Stuttgart de l'avant-guerre
A cheval sur le Neckar, le faubourg de Bad Cannstatt a subi l'essentiel des destructions infligées par l'attaque d'avril 1943. Ce panorama d'avant-guerre illustre la topographie de la région, enserrée entre des montagnes basses, où alternent quartiers urbains, zones industrielles, petits bois et espaces verts. Au premier tiers avant, le Neckar est presque indiscernable au milieu des constructions. Sur la droite, le gazomètre de Gaisburg domine la rivière et on devine, derrière l'esplanade des foires, le quartier d'Untertürkheim où se trouvent l'usine Daimler-Benz et les ateliers de réparation des locomotives. Les bombardiers ont survolé ce secteur de la gauche vers la droite, en direction du centre-ville de Stuttgart, qui s'étend dans une vallée affluente du Neckar. [Collection JT.]
Avec peu d'égard pour le patrimoine culturel, le Bomber Command a choisi la Schloßplatz comme point de visée de ses avions.
Si Stuttgart est qualifiée de "ville des Allemands de l'étranger" sous les nazis, elle fut avant tout une résidence royale presque sans interruption de 1321 jusqu'aux rois de Wurtemberg de 1806 à 1918. Le centre-ville abrite ainsi de magnifiques bâtiments : palais, églises, la mairie, d'anciennes maisons, … Parmi ceux-ci, le neue Schloß (Nouveau Château) achevé en 1807, que l'on voit ici [collection JT]. A la fin du XIXe siècle, Stuttgart devient également le berceau de l'automobile quand Gottlieb Daimler et Wilhelm Maybach commercialisent leurs premiers modèles à Bad Cannstatt, puis Untertürkheim. De nombreux établissements industriels se développent alors en périphérie de la ville.
En ciblant Barbel 'C', l'objectif des Britanniques n'est pas de raser des merveilles d'architecture, mais l'état-major de Harris fait le raisonnement qu'en visant le centre, compte tenu de l'imprécision des avions, un maximum de bombes pourrait faire des "dégâts utiles". En pratique, le cœur de la ville évitera les destructions pendant encore plus d'une année, jusqu'aux raids de l'été 1944 qui auront les résultats catastrophiques montrés plus haut.
A la différence de nombreuses villes bombardées, que même leur reconstruction a laissées défigurées, Stuttgart a retrouvé l'essentiel de ses trésors et de son charme passés.
La vue ci-dessus d'Untertürkheim dans les années 30 est emblématique du paysage industriel de Stuttgart [collection JT]. Elle donne à voir l'usine Daimler-Benz située derrière la voie ferrée et le quartier d'habitation au premier plan à droite ; en évidence sur l'autre rive du Neckar, le grand gazomètre de Gaisburg construit en 1928-29 marque l'emplacement de la cokerie gazière qui alimente la ville. Ces installations ont pour l'essentiel échappé à l'attaque du 14/15 avril – la cokerie a enregistré des dégâts légers –, mais les bombes ne sont pas tombées loin. Des incendiaires ont en effet ravagé le Kommando 3057 de Gaisburg qui était établi au bord du Neckar, entre l'usine à gaz et le Daimler Brücke que l'on distingue devant, un peu sur la gauche ; plusieurs centaines d'hommes y ont perdu la vie cette nuit-là.
Après-guerre, Stuttgart a su également rebâtir son potentiel industriel : l'usine Daimler-Benz (aujourd'hui Mercedes-Benz) fonctionne toujours, la production de gaz n'a cessé qu'en 1973-74, mais le gazomètre est encore utilisé pour du stockage.
Et si le camp d'Ulmer Straße a disparu, une plaque commémorative rappelle le souvenir des 434 victimes…